|
|||
C'est de très bon matin que nous quittons une ville où quelques ombres furtives se dirigent vers la mosquée pour la prière matinale. Dans l'aéroport désert où seuls s'agitent quelques moustiques assoiffés de sang frais, nous attendons d'embarquer pour l'île de Socotra à quelques 400 Km des côtes du Yémen, au large de la Somalie. Un bout de terre détaché du continent Africain il y a plusieurs dizaines de milliers d'années, hôte de plus de trois cents espèces endémiques d'arbres et d'animaux. Après une courte halte a Sana'a, nous survolons le paysage fantastique des montagnes du Yémen entrecoupées de larges rivières à sec. Après une heure de vol, nous atterrissons à Hadibo, capitale de l'île. Chaque arrivée d'avion est un évènement pour les habitants qui dépendent du continent pour nombre de produits de première nécessité, tel que les fruits ou les légumes, rares sur l'île, les pièces détachées pour les rares voitures qui y circulent grâce au carburant importé et bien sûr le qat qui se consomment sur l'île deux fois par semaine lorsque un avion atterrit à Hadibo. C'est donc la moitié de la population de Socotra qui nous attend à l'aéroport dans un tumulte indescriptible. Ahmed, employé par l'association humanitaire triangle nous réceptionne et nous conduit dans Hadibo par l'unique route goudronnée de l'île. Un rapide déjeuner avalé dans un des restaurants de l'unique rue marchande de la ville, nous nous rendons sur le bord de mer pour nous perdre dans la contemplation d'une eau translucide où deux dauphins viennent nous souhaiter la bienvenue. Un coucher de soleil plus tard, nous retournons dans nos quartiers où défilent les amis de notre hôte, attirés par notre présence mais surtout par une télévision avec antenne satellite, alimentée par un groupe électrogène, raretés sur l'île. Le lendemain nous partons à la découverte de l'île en 4x4. Première halte à Ayfhet, zone protégée au milieu des montagnes où vivent quelques éleveurs dont les maisons de fortune se confondent avec les arbres avoisinants. Nous partageons un poisson grillé, du lait caillé et quelques verres de thé avec quelques locaux à l'ombre d'un arbre majestueux. ![]() Dimanche, départ pour le Nord-est de l'île, pays d'origine d'Ahmed. Sur la route du gigantesque plateau qui sépare Hadibo de notre destination, nous pouvons admirer la verdure du paysage, encerclé de montagnes et peuplé d'arbres inconnus, parfois ornés de petites fleurs roses, semblables à celles des lauriers roses. Après un arrêt en bord d'une mer aux couleurs paradisiaques, nous arrivons après quelques heures dans la zone de Mumi, dans la demeure d'un cheikh local qui nous accueille dans sa salle de réception construite autour d'un arbre aux branches torturées. Quelques tasses de thé plus tard, nous nous mettons d'accord pour le programme des jours à venir en vue d'une découverte des environs à dos de chameaux. Nous plantons la tente aux abords du hameau et nous nous endormons tout excité par les évènements à venir. C'est de bon matin que nous nous hissons au sommet des chameaux qui nous serviront de montures pour les deux jours à venir. Accompagnés du cheikh et d'un de ses enfants nous parcourons un nouveau plateau, circoncis par de vieilles roches érodées par le vent et la pluie, abri pour les pasteurs locaux. Quelques citernes de fortunes complètement vides témoignent des difficultés d'approvisionnement en eau, alors qu'un soleil de plomb nous assèche peu à peu le gosier. Heureusement, une halte est prévue chez la soeur du cheikh. Retour dans le temps. Nous nous retrouvons assis dans une grotte où l'objet le plus moderne est un thermos pour le thé. Rien n'a changé depuis plusieurs milliers d'années et nous partageons un peu de riz avec les habitants de la caverne. Nous distribuons cigarettes, médicaments et ballons gonflables pour la plus grande joie du petit mohammed que nous apprivoisons par ce biais. Retour sur nos chameaux après quelques heures de farniente et une sieste préhistorique, à travers les montagnes couvertes d'une végétation éparse où les arbres ont peine à pousser en raison d'un vent terrible qui souffle pendant la moitié de l'année, vent de mousson qui balaye tout sur son passage. ![]() Nous passons donc un temps certain dans une espèce de salle commune, faite de branches de palmier nouées à l'aide de cordages, où chacun entre et sort à sa convenance. Nous buvons chaque jour dans cette salle une trentaine de verre de thé, au choix avec ou sans lait. Heureusement que notre séjour en Angleterre nous a vacciné de cette curieuse coutume. Le lendemain de notre arrivée coïncide avec l'ayd al qabhir, célébrant le non sacrifice d'Ismaël par Abraham. L'attraction principale de cette journée est le sacrifice d'une chèvre, menu fastueux pour les locaux plus habitué à leur ration quotidienne de thé et de riz. C'est donc avec ferveur religieuse et appétit que le village entier se rassemble dans la salle commune pour faire un sort à la moindre parcelle de viande comestible sortie de l'intérieur de la chèvre, boyaux et intestins compris. Pour digérer, nous repartons sur nos chameaux pour une courte ballade. Nous remontons à pied le cours d'un wadi à sec pour déboucher soudainement sur un paysage à couper le souffle. Une piscine naturelle s'est formée dans le cours du wadi et un petit ruissellement vient la maintenir bien remplie. Au-delà de cette piscine, les flots tumultueux se sont creusés dans la roche une cascade à leur mesure, puis dévalent jusqu'à la mer dans un wadi bordé de palmiers dattiers que l'on aperçoient en contrebas. Nous restons assis presque une heure à contempler ce paysage dont on imagine l'aspect grandiose lorsque dame nature déchaîne les vents de moussons gonflant le niveau des hauts jusqu'à la démesure. Nous quittons à regret ce lieu pour retourner vers nos montures. ![]() Journée idéale qui se prolonge malheureusement tard dans la nuit en raison de l'attaque sanguinolente de puces rageuses, laissées en cadeau par nos montures des derniers jours, qui parviennent en l'espace d'une nuit à nous recouvrir tous deux d'une centaine de piqûres chacun qui sont autant de démangeaisons potentielles. Les photos du séjour vous parviendrons peut être un jour mais je crains qu'elles ne témoignent qu'en substance de l'incroyable atmosphère qui règne sur cette petite île qui hésite entre les avantages de la modernité et le statut de conservatoire naturel, mais qui reste à ce jour un des rares endroits où la vie sans artifices existe. Pour ceux qui souhaiteraient s'informer d'avantage sur la bio-diversite de l'ile, deux adresses internet:
previous news >> |